« NARCISSE » JMD
C’est le drame d’un amour vain qui même s’il a été entendu, n’a pu être ni reconnu, ni accepté. {…}
Ainsi est l’histoire de Narcisse.
Narcisse, né des eaux violentes du non-désir mourut d’une eau pure et calme qui fut l’objet de transgression de l’interdit.
Il mourut de n’avoir jamais pu faire un avec sa propre image et d’avoir toujours rejeté la possible naissance d’un attrait-désir installant la reliance là où il n’y avait qu’isolement et division.
Nous pouvons reconnaître dans cette histoire toutes les caractéristiques que nous attribuons généralement à tous ceux que nous affublons de l’étiquette de « troubles narcissiques » depuis les « simples narcissiques » proches de la névrose jusqu’aux déroutants et éprouvants « borderline » qui nous donnent parfois l’impression d’avoir un pied dans la psychose.
Le mythe met en évidence la nature de cette blessure profonde dont on ne se remet jamais et qui entretient la souffrance de la blessure par cette dramatique impossibilité à créer des liens, ou à les entretenir.
Voici quelques composants de cette blessure {je ne les ai pas tous notés, se référer à Narcisse, de Jean-Marie Delacroix} :
- L’empreint indélébile d’un contexte marqué par la toute-puissance du maternel et du féminin et par l’absence de père,
- La difficulté à s’insérer dans le quotidien et à accepter le corps comme espace intermédiaire entre soi et l’autre,
- L’ambivalence constante dans les sentiments, et la confusion des sentiments,
- Le clivage entre l’intérieur et l’extérieur, le masculin et le féminin, le bon et le mauvais,
- « Aimer » une hypothétique image de soi-même au lieu de s’aimer soi-même,
- L’isolement et la solitude,
- La difficulté à établir une relation amoureuse durable, dans la continuité,
- Le sentiment de ne pas s’appartenir, de n’appartenir à personne, de n’être personne,
- Le sentiment de s’autodétruire, d’entretenir son échec et parfois d’être « manipulé » par une force extérieure qui nous échappe,
- Le sentiment de ne pouvoir vivre qu’en pointillés, dans la distance, en se méfiant de l’autre.
Ainsi les « narcissiques » deviennent des écorchés vifs, pris dans un douloureux dilemme: ce qu’ils souhaitent le plus, à savoir une relation d’amour, est en même temps ce qui leur fait le plus peur. Et quand ils font un pas en avant, ils en font deux en arrière. Ils vivent ainsi constamment dans le manque, le vide, la solitude et la souffrance d’une vie qui n’a pas de sens.
Narcisse, Jean-Marie Delacroix, in. Liens précoces, liens actuels, les pathologies limites, Cahiers de Gestalt-thérapie n°6, éd. L’Exprimerie, 1999
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